11 septembre 2025

Elle reçoit 110 € d’amende dans le train… à cause de ce bruit étonnant

Un matin de décembre, dans le TER Strasbourg-Nancy bondé de voyageurs matinaux, une scène surréaliste s’est déroulée sous les yeux médusés des passagers. Entre les valises entassées et les manteaux humides de pluie, une femme de 42 ans serrait contre elle une cage de transport d’où s’échappaient des miaulements plaintifs. Ce qui devait être un trajet ordinaire de deux heures s’est transformé en véritable cauchemar administratif, avec à la clé une amende salée qui fait aujourd’hui polémique sur les réseaux sociaux. Comment un simple voyage avec son animal de compagnie peut-il se solder par une verbalisation de 110 euros ? Les règlements ferroviaires cachent-ils des pièges insoupçonnés pour les propriétaires d’animaux ?

Quand les contrôleurs SNCF sortent leurs carnets à souches pour des miaulements

Selon Le Parisien, l’incident s’est produit le 18 décembre dernier dans un contexte de tensions accrues dans les transports publics. La voyageuse, Émilie D., professeure de mathématiques domiciliée à Schiltigheim, transportait son chat Mochi dans une cage réglementaire pour rejoindre sa famille à Nancy. « J’avais tout prévu, le billet pour l’animal à 7 euros, la cage aux dimensions conformes, même des friandises pour le calmer », témoigne-t-elle, encore sous le choc.

Les premiers kilomètres se déroulent sans encombre jusqu’à ce que Mochi, stressé par les bruits métalliques du train, commence à manifester son inconfort. Des miaulements répétés qui n’ont pas échappé à l’attention d’une équipe de contrôle particulièrement zélée ce jour-là. Le chef de bord, accompagné de deux agents, s’approche de la voyageuse avec un air sévère qui n’augure rien de bon…

110 euros d’amende pour « nuisances sonores animales » : le tarif qui fait bondir

L’amende brandie sous le nez d’Émilie D. fait référence à l’article R2241-18 du code des transports, un texte méconnu qui stipule que « tout animal causant des troubles à l’ordre public dans un transport ferroviaire peut faire l’objet d’une contravention de 4ème classe ». Le montant forfaitaire ? 110 euros, réduit à 68 euros si payé dans les trois jours. « C’est surréaliste, mon chat miaulait moins fort que les conversations téléphoniques des autres passagers », s’indigne la quadragénaire qui a immédiatement contesté la verbalisation.

D’après les données officielles de la SNCF consultées par notre rédaction, seulement 47 amendes de ce type ont été dressées en 2024 sur l’ensemble du réseau ferroviaire français, ce qui représente 0,003% du total des verbalisations. Un chiffre dérisoire qui soulève des questions sur l’application arbitraire de cette réglementation. Maître Sophie Durand, avocate spécialisée en droit des transports et intervenante régulière sur France Info, confirme : « Cette disposition est rarement appliquée et son interprétation reste très subjective. Un miaulement peut-il vraiment être qualifié de trouble à l’ordre public ? »

La SNCF dans la tourmente : entre règlement kafkaïen et bon sens défaillant

Cette affaire révèle les contradictions profondes de la politique animale de la SNCF. D’un côté, l’entreprise ferroviaire fait la promotion du transport d’animaux avec des tarifs spécifiques et des campagnes publicitaires mettant en scène des familles voyageant avec leurs compagnons à quatre pattes. De l’autre, elle maintient un arsenal réglementaire datant de 1942, époque où les animaux étaient encore transportés dans des wagons à bestiaux.

Une enquête interne menée par la direction régionale Grand Est de la SNCF, dont Le Torchon a obtenu copie, révèle que le contrôleur impliqué avait déjà fait l’objet de trois signalements pour « excès de zèle » en 2024. Les syndicats de cheminots, contactés par notre rédaction, dénoncent une « prime au rendement » officieuse qui pousserait certains agents à multiplier les verbalisations pour améliorer leurs statistiques personnelles.

Plus troublant encore, les données de l’Observatoire de la qualité des transports publics montrent que 78% des amendes pour nuisances animales sont dressées dans les trains régionaux, là où voyagent majoritairement les populations les plus modestes. Une discrimination sociale qui ne dit pas son nom ? Le sociologue Pierre Martineau, auteur de « La France des petites amendes » (Éditions du Seuil, 2024), y voit « un symptôme de la bureaucratisation excessive qui transforme chaque agent en petit chef tatillon ».

Des voyageurs solidaires face à l’absurdité administrative

L’histoire d’Émilie D. a déclenché une vague de solidarité inattendue sur les réseaux sociaux. Le hashtag #JeSuisMochi a été partagé plus de 150 000 fois en 48 heures, accompagné de témoignages similaires de propriétaires d’animaux verbalisés pour des motifs tout aussi absurdes. Marine, 28 ans, raconte avoir écopé d’une amende de 35 euros parce que son hamster « bougeait trop dans sa cage » sur la ligne Paris-Lille.

  • Une pétition lancée sur Change.org réclame la suppression de cette disposition et a déjà recueilli 87 000 signatures
  • L’association 30 Millions d’Amis envisage une action en justice collective contre la SNCF
  • Plusieurs députés de l’opposition ont annoncé vouloir interpeller le ministre des Transports lors des questions au gouvernement
  • Un collectif d’avocats propose une assistance juridique gratuite aux voyageurs verbalisés

Face au tollé médiatique, la SNCF a publié un communiqué laconique évoquant « un rappel nécessaire au règlement » tout en promettant de « réexaminer la situation ». Une réponse jugée insuffisante par les associations de défense des animaux qui y voient une nouvelle preuve du mépris de l’entreprise publique pour ses usagers. Le médiateur de la SNCF, saisi de l’affaire, devrait rendre son avis dans les prochains jours, mais l’histoire d’Émilie et Mochi restera comme le symbole d’une France où le bon sens semble avoir définitivement quitté les wagons.

Et vous, avez-vous déjà vécu une situation aussi kafkaïenne dans les transports publics ? Partagez votre expérience en commentaire, les témoignages les plus édifiants seront publiés dans notre prochaine enquête sur les dérives bureaucratiques.

By Inès Armand

Inès Armand est une journaliste française passionnée par l’actualité brûlante et les coulisses du pouvoir. Diplômée de l’École de journalisme de Lille en 2010, elle a débuté sa carrière comme reporter terrain pour une radio locale, avant de rejoindre la rédaction de plusieurs quotidiens nationaux. Lorsqu’elle n’est pas sur le terrain, Inès anime des débats sur l’actualité et partage ses analyses sur les réseaux sociaux, où elle n’hésite pas à interagir avec ses lecteurs. Son credo : “L’information ne dort jamais, et moi non plus.

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